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La violence : un élément fondamental du rap ?

Le procès du rappeur Young Thug s’est ouvert ce lundi 9 janvier à Atlanta. Sont retenus contre lui de nombreux chefs d’accusation, notamment « association de malfaiteurs en vue d’enfreindre la loi RICO (Racketeer Influenced and Corrupt Organizations) » et « participation à une activité de gang de rue criminelle ».

Young Thug lors des BET Hip Hop Awards à Atlanta en 2021. (Crédit photo : Paras Griffin – AFP).

Il n’est pas rare dans le monde du rap d’entendre des affaires de violence ou de prison, même dans les paroles de leurs chansons. La violence est-elle donc un élément fondamental du rap ?

Des origines violentes

Avant de parler de la violence dans le rap. Qu’est-ce-que la violence ? Selon l’Organisation Mondiale de la Santé, la violence est « l’utilisation intentionnelle de la force physique, de menaces à l’encontre des autres ou de soi-même, contre un groupe ou une communauté, qui entraîne ou risque fortement d’entraîner un traumatisme, des dommages psychologiques, des problèmes de développement ou un décès ». 

Depuis ses débuts, le rap est symbolisé par la « figure menaçante du jeune Noir insoumis du ghetto, et visé par les médias, la police ». L’histoire du rap s’est effectuée dans la violence : le viol de Central Park en 1988 qui a fait découvrir le rap aux médias, les émeutes de Los Angeles en 1992, l’inculpation de Snoop Doggy Dog pour meurtre fin 1993, et la bataille entre Tupac Shakur et Notorious B.I.G., qui renforçait la rivalité qui opposait et oppose encore de nos jours la côte Est et la côte Ouest.

Un style « vulgaire »

Le rap fait preuve de violence à travers ses paroles et son style. Un rythme, intense, fort, une sorte d’agressivité, qui renforce cette impression de violence. De plus, le vocabulaire utilisé n’est pas soutenu, certaines phrases peuvent être choquantes. Par exemple, Sneazy, qui disait « Les journalistes salissent l’islam, sont amateurs comme Pascal Praud, ça mérite une balle dans le cervelet, le canon au fond de la bouche », ou encore Lefa qui chantait « On est homophobes à 100% et on l’assume ».

Le rap ce n’est pas de la pop avec des éléphants roses et des ballons »

Ice-T, 1996. 

Dans le rap, notamment les clips, l’incitation à la violence est commune : culte des armes ou consommation de stupéfiants par exemple. Avec l’arrivée des réseaux sociaux, les combats reprennent : par des tweets, on se charie voire on s’insulte. Cette situation avait d’ailleurs dégénéré entre Booba et Kaaris qui s’étaient battus à l’aéroport d’Orly. En Suisse, des conflits avaient également eu lieu : des bandes de jeunes se provoquaient sur les réseaux sociaux à travers des clips YouTube, puis s’affrontaient dans la rue.

Une nouvelle forme de rap

Lucie Cayrol, journaliste ayant réalisé un mémoire sur le traitement journalistique du rap francophone, expliquait « le rap dit violent est une minorité du rap disponible aujourd’hui. » Si aux débuts du rap la violence était de mise, aujourd’hui d’autres formes de rap sont disponibles. Les rappeurs Roméo Elvis ou Lomepal proposent des textes plus calmes avec un vocabulaire plus soutenu, et des rythmiques bien différentes de celles de Booba ou La Fouine par exemple. 

Souvent insultées ou objectivées, les femmes ont désormais leur place dans le rap. Côté américain, Nicki Minaj ou Cardi B ont réussi à s’imposer face à un milieu plutôt masculin. En France, la rappeuse Chilla a même écrit une chanson nommée #balancetonporc où elle dénonce le harcèlement.

La question de la violence n’est pas inhérente au rap, il y a une forme de violence sublimée et cathartique qui permet de dépasser la violence à travers le texte et le mot et non une violence réelle.”

La philosophe Benjamine Weill précise cette question de la violence.

Le rap a donc dépassé cette image de violence, qui aujourd’hui est même considérée comme un cliché par certains rappeurs, même si elle n’a pas totalement disparu. 

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